Étiquette : cheminement

Tatoué

Tatoué

Les bleus à l’âme

Ta peau comme un parchemin, ici des tatoués, tu en croises tous les matins. La peau pour dire, comme un ultime désir, en couleur ou en noir, pour raconter une histoire, un dessin comme un miroir de ce qui marque nos destins.

Tatoués …par la vie, je CROIS que nous le sommes tous d’une certaine façon, par des évènements heureux, par d’autres plus douloureux, au dehors comme au dedans, la vie balise son passage sûrement.

N’allez pas vous y tromper, je n’ai rien à étaler, pas question de faire pleurer, c’est juste une affaire de partage, un chemin qui peut aider, malheureusement on ne part pas tous avec les mêmes bagages…

Mon Premier Taouage: Leucémie aigüe

C’est un tattoo un peu brutal, voire violent mais Je CROIS que si je devais le représenter, je ferais un beau soleil, avec tout le respect que j’ai pour ceux qui sont dans l’épreuve, pour ceux qui y sont restés, cet évènement a « illuminé » ma vie, il m’a apportée une vraie lumière sur le monde qui m’entoure. On m’a privée de mes sens, on m’a isolée, enfermée entre quatre murs, on m’a fait des misères, un brin de torture, puis j’ai redécouvert le vent sur ma peau, le chant des oiseaux, je me suis nourrie de la force de l’océan, et j’ai pu enfin retrouver la joie de la douceur des joues de ma maman. J’ ai côtoyé le pire et le meilleur et je suis à nouveau née.

Leucémie, ce n’est pas le titre d’un film, je CROIS que ce serait plutôt une vilaine comédie, entre toi et la vie qui se jouerait plutôt dans les graves. Le sujet me (re)tourne autour depuis quelques temps, comme si la vie me sollicitait en insistant, il toque à ma porte régulièrement comme pour me dire « fais en quelque chose maintenant ». La vie est assez têtue finalement, quand elle veut te faire comprendre quelque chose, elle te le ramène incessamment sur le rivage, jusqu’à ce que tu saches comment tourner la page.

Décembre 2015, on a mis 22ans à en (re)parler à la maison, confession sur le canapé, comme pour crever certains abcès. Puis en Juillet 2016, à nouveau les souvenirs émergent, par la promotion au titre de Patron de L’institut national du cancer, de celui qui m’a sauvée la vie en 1993. Le sujet revient il y a quelques semaines  encore avec Alabama Monroe, une pierre deux coups, le film parle tatouages et leucémie, comment chacun accueille la vie, comment on encaisse les coups et comment on se remet debout…ou pas. Enfin pas plus tard que la semaine dernière, c’est ma belle-fille de 16ans,  qui après 7ans de vie commune, me demande après dîner de lui raconter.

Je réalise alors combien je suis tatouée par ces 6 mois d’hospitalisation, puis par les années qui ont suivi. Combien tout est vif aujourd’hui encore dans mon esprit, combien toute cette période m’a collée à la peau, faisait partie de mes nuits, de mes jours, toujours lovée dans un coin de ma tête, plaquée au coeur, présente dans chacun de mes pas, dans chacune de mes respirations…je CROIS que pendant  longtemps tous ces moments sont restés omniprésents.

A l’époque, pas de psy pour t’aider, pour déverser la colère, les questions, pas d’ateliers pour apprendre à t’accepter, imberbe, à mi-chemin entre le bonhomme Michelin (bouffie que tu es par les chimios) et Sigourney Weaver dans Alien…vous voyez le tableau?! Je CROIS que la seule chose qu’on m’ait envoyée c’est une religieuse, elle m’a fait peur, j’ai cru qu’elle venait pour l’extrême onction…je l’ai expédiée sans explication!

Faut que je vous confie un secret, quelques jours après être arrivée aux urgences, dans l’unité Siguier du service d’hématologie du CHU d’Angers, j’ai du signer (19ans à peine) à 40° de fièvre un papier qui demandait mon accord pour qu’on teste sur mon cas un traitement venant des Etats-Unis …donc je CROIS que  je suis actuellement en plein pèlerinage!. J’espère juste qu’il aura sauvé la peau de beaucoup d’autres comme il a sauvé la mienne.

12 mois, c’est le temps qu’il m’a fallu pour lutter, encaisser et me relever. C’est photographique, de vrais instantanés, un concentré d’émotions, la maladie ce catalyseur à la con. Faudrait vous dire comment l’encre se glisse doucement sous la peau,  comment l’esquisse prend forme, jour après jour, comment le trait s’affine avec amour. Il n’y aurait aucune impudeur à raconter, la bulle, l’isolement, la coupe Kojak, la greffe, le rire, les larmes, la douleur physique, la souffrance psychologique, la peur, le noir, la solitude, le désespoir des malades autour…et puis l’amour, beaucoup d’amour. Parce que raconter peut sans doute aider certains sur le chemin. Parce que je CROIS que même si tout ton entourage fait preuve de compassion, tu ne trouves la véritable compréhension que dans le regard de ceux qui vivent la même condition.

En hommage à tous les tatoués, ceux qui sont partis trop tôt, ceux qui sont restés et ceux qui luttent encore, dites vous que sous chaque épreuve se cache un fabuleux trésor : cette rencontre avec vous même. Je ne souhaite de cancer à personne, mais cette épreuve a changé mon regard à bien des égards, quand tu passes par ce genre de chose, après la vie c’est comme un éléphant rose. Je CROIS définitivement que ça ne veut pas dire que désormais tout ira bien, c’est juste qu’on t’a remis quelques cartes en main.

Je CROIS que si je devais me faire tatouer demain, je choisirais BELIEVE, parce que CROIRE, par dessus tout c’est ce qui m’a sauvée à vie.

Chiche !

Source : Creative Fan

Combien d'étoiles donnez-vous à cet article ?