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Je suis transsexuel

Je suis transsexuel

L’oiseau rare

Des mois de silence et je reviens par hasard en ce jour 6.6.6, chiffre symbole de l’harmonie, de l’amour, de la vie de famille et des relations. Je viens vous parler d’une rencontre aussi rare et précieuse que douloureuse qui vient me rappeler chaque jour qu’il est important de cultiver l’amour, la tolérance et le non jugement.

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Je m’appelle A., j’ai 40ans, de petite stature, j’ai la barbe et le cheveux court, si tu me croises dans la rue, tu te diras certainement : « IL me parait fragile »…et pourtant.

D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours eu le sentiment de n’être pas né(e) dans la bonne enveloppe corporelle. Tout petit déjà vers 4ans je hurlais pour ne pas porter de robes, je me faisais appeler Tony par mes copains de l’époque et tout naturellement j’aimais les filles. A l’adolescence, très mal à l’aise avec mes formes, je cachais mes seins sous des tshirts amples. 

J’ai grandi dans une famille qu’on pourrait dire « bancale », une mère un peu spéciale, un beau père intolérant et un père aux abonnés absents que j’ai retrouvé à l’âge de 24ans. Gamin un peu sauvage, je passais mon temps dehors avec mon chien, l’âme solitaire malgré mes deux frères.

Je connus mon premier amour à 16ans et quittais ma famille dans les mêmes temps. Toujours aussi peu en phase avec mon corps jusque dans mes relations amoureuses. Je ne me suis jamais dit homosexuel(le), parce que je ne le suis pas. J’ai la conviction profonde que si j’étais né dans un corps d’homme j’aurais eu une vie très traditionnelle, j’aurais été le mari de, j’aurais eu deux enfants, une maison, un chien mais la vie en a décidé autrement…je dois très certainement avoir une dette karmique à payer. 

Je n’ai jamais eu à souffrir du mépris des autres, j’aime profondément l’humain et j’avais à coeur de mettre l’autre au centre de mes préoccupations ce qui faisait de moi un être « transparent », agréable, je ne revendiquais rien, j’étais, difficilement moi, mais j’étais.

Cette difficulté à être transparaissait dans mon mode de vie. Début de la trentaine je me suis enfoncé dans la cocaïne, parce que cette drogue m’aidait pleinement à m’affirmer tel que je me sentais, elle me donnait tout le courage, je refusais les « Madame » ou les « elle », c’est à cette période où je décidais de mettre tout en oeuvre, grâce à un magnifique plan, pour réaliser MA transition. 

J’avais décidé d’aller travailler 3 mois dans les fermes de cannabis en Californie pour me faire un maximum d’argent pour me permettre ensuite de me faire opérer des seins en Thaïland. Ce voyage participa à mon sevrage de la C. mais j’y vécu mon retour de bâton dû certainement à cette période d’abstinence saud que le plan ne s’est pas déroulé comme prévu.

La décision de faire ma transition étant actée, à mon retour en France j’appelle le service trans de Bordeaux à Charles Perrens. A ma grande surprise j’obtiens un rendez-vous très rapidement, tout s’aligne parfaitement pour me faciliter ce chemin et m’engage dans un accompagnement avec des psychatres, passage obligatoire pour voir aboutir mon rêve.

A cette même période de ma vie, je rencontre une femme, un ange qui m’aimera de façon inconditionnelle pendant 4 mois et qui me montrera que je peux être aimé pour ce que je suis et m’appellait « il » très naturellement. 

Après un an de suivi psy, je m’engage sur la voie du traitement hormonal à la testostérone que j’aurais désormais à vie, commence alors le lent et doux chemin de la transformation physique, pousse des poils, la voix qui se modifie, les règles qui disparaissent…Les gens ont alors commencé à me dire « il », je me bandais les seins pour gommer cette dernière marque de féminité, ce fût donc l’étape suivante.

Le deuil semble difficile à faire pour les personnes qui me connaissent d’avant et qui continuent à me dire « elle », c’est à leur tour de faire la transition. Le plus beau cadeau a été la présence et le soutien de mon père, le plus grand regret sans doute le manque de reconnaissance de ma mère.

Je n’ai rien à cacher, je joue carte sur table, ce qui importe c’est mon authenticité, je n’ai pas à souffrir de malveillance de ceux qui me sont proches par contre il m’arrive parfois de rencontrer la bêtise humaine, le mépris et l’intolérance. Ce qui me peine le plus c’est de m’entendre dire, il va falloir que tu t’y habitues, que tu te blindes…mais où sont passées nos valeurs de tolérance en France?

Puis Comme il n’y pas de hasard, dans ma vie pro, je prends soin des autres, je suis éducateur car c’est ce qui m’anime profondément, aider ceux qui sont dans la différence, la marginalisation, la désocialisation engendrée par ce monde dit moderne.

Aujourd’hui je suis moi, plus proche que je ne l’ai jamais été, avec un traitement à vie qui me rappelle chaque jour le chemin qu’il m’a fallu emprunter pour arriver jusque là, il est d’ailleurs tatoué sur mon bras, représenté par une caravane de dromadaires. Ce tatouage représente à mon sens le nomadisme, il fait écho à ma vie.

Si tu lis ces lignes que tu sois perdu ou non dans ton corps, n’oublie pas…

ECOUTE TON JOYAU INTERIEUR ET SOIS HEUREUX.

A. by M.

 

Photo : The caravan in the desert by jaci XIII

 

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